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1er centre de lutte contre le cancer en Europe, 4 000 professionnels mobilisés

Villejuif, le 14 février 2019

Attention à l’utilisation d’un traitement contre le reflux acide en même temps qu’un médicament contre le cancer

L’utilisation de médicaments anti-acide impacte de manière négative la survie de patients atteints de cancer et traités par pazopanib (Votrient, un traitement anticancéreux). Chez les patients atteints de cancer (sarcome), l'utilisation concomitante d'un médicament diminuant l’acidité gastrique et du pazopanib, réduit considérablement la survie sans progression de la maladie ainsi que la survie globale, selon les résultats publiés dans Clinical Cancer Research, une revue de l'American Association for Cancer Research (AACR).

« Nos résultats indiquent que les anti-acide (anti-secrétoires) réduisent l'efficacité du pazopanib chez les patients atteints d'un sarcome des tissus mous métastatique », déclare le Dr Olivier Mir, oncologue médical et pharmacologue à Gustave Roussy. « Les médecins et les pharmaciens devraient particulièrement surveiller les patients qui prennent ces deux traitements simultanément car leur association peut avoir un impact négatif significatif ».

Les médicaments anti-acide (anti-sécrétoires) sont très utilisés en cancérologie ; on estime que jusqu'à 50 % des personnes qui suivent un traitement contre le cancer prennent aussi ce type de traitement. Les médicaments anti-acide classiques comprennent les inhibiteurs de la pompe à protons comme l'oméprazole (Mopral) et l'esoméprazole (Inexium), ou les inhibiteurs des récepteurs H2 de l'histamine, comme la ranitidine (Azantac). Certains de ces médicaments sont disponibles et en vente libre dans de nombreux pays occidentaux, dont la France.

« L'absorption du pazopanib, un inhibiteur de tyrosine kinase utilisé dans le traitement du cancer du rein et des sarcomes des tissus mous, dépend du pH », note le Dr Mir. « Nous savons que les comprimés de pazopanib pris par voie orale doivent passer dans un milieu acide, c'est-à-dire dans l'estomac, pour se dissoudre », explique-t-il. « Comme la principale fonction du traitement anti-acide est de réduire l'acidité de l'estomac, ces traitements peuvent diminuer l'absorption du pazopanib » poursuit le Dr. Mir.

Des travaux antérieurs ont montré que les traitements anti-acide réduisaient le taux de  pazopanib dans le sang de patients atteints de tumeurs solides. « Nous avons recherché si l'utilisation de médicaments anti-acide pouvait avoir un effet sur la survie des patients atteints de sarcome qui prenaient du pazopanib » ajoute-t-il.

Pour cela, les données combinées de deux essais cliniques ayant permis l’enregistrement du pazopanib dans le traitement des sarcomes (notamment en Europe et aux USA) ont été analysées : un essai de phase II qui avait évalué la tolérance et l'activité anti-tumorale du pazopanib chez des patients atteints de sarcome avancé des tissus mous, et un essai comparatif de phase III qui avait évalué l'efficacité du pazopanib contre un placebo chez des patients atteints de sarcome avancé des tissus mous et précédemment traités par chimiothérapie. Au total, 333 patients traités par le pazopanib étaient éligibles à l'analyse ; sur les 333 patients, 117 (35,1 %) ont reçu des médicaments anti-acide au moins une fois pendant le traitement avec le pazopanib, 59 (17,7 %) ont pris un anti-acide pendant plus de 80 % de la durée du traitement au pazopanib, et 19 (5,7 %) étaient déjà sous traitement au moment de l’initiation du pazopanib.

À la suite d'une analyse multivariée, les résultats montrent que les patients ayant pris un traitement anti-acide pendant au moins 80 % de la durée du traitement au pazopanib ont réduit considérablement la survie sans progression de leur cancer par rapport à ceux qui n’ont pas eu recours au traitement anti-acide (médiane de 2,8 mois contre 4,6 mois).
La médiane de survie globale est aussi négativement impactée de manière significative. Elle est de 8 mois pour les patients qui ont eu recours à ces traitements anti-acide pendant au moins 80 % de la durée du traitement au pazopanib contre 12,6 mois pour ceux qui n’en ont pas pris.

Parmi les 110 patients de l'étude de phase III ayant reçu le placebo et éligibles à l'analyse, il n'y avait aucun lien entre l'utilisation simultanée d’anti-acide et la survie sans progression ou la survie globale. « Cela suggère que l'interaction médicament-médicament entre les anti-acide et le pazopanib a eu une incidence directe sur les résultats de survie des patients atteints de sarcome », conclut le Dr Mir.
Autre effet constaté : le traitement anti-acide n'a pas réduit la fréquence des effets secondaires liés au pazopanib.

« En démontrant qu’il est clairement déconseillé d’associer des anti-acide au traitement par le pazopanib, les résultats de cette analyse devraient inciter les oncologues à modifier la prise en charge de leurs patients », précise-t-il.

« Les patients ont souvent recours à des anti-acide pour soulager des douleurs abdominales qui ne sont pas toujours directement liées à l'acidité de l'estomac ». Il ajoute « La majorité des patients atteints de cancer qui prennent des médicaments anti-acide pourraient avoir recours à un traitement différent pour soulager ces symptômes. Il est absolument primordial que les patients informent leurs oncologues de tous les médicaments qu'ils prennent pendant le traitement du cancer, y compris ceux en vente libre, et y compris les plantes médicinales, afin que de potentielles interactions médicamenteuses délétères puissent être évitées ».

Cette étude a été financée par le Fonds Cancer (FOCA) Belge, et conduite au sein de l’EORTC.

Source

Impact of concomitant administration of gastric acid-suppressive agents and pazopanib on outcomes in soft-tissue sarcoma patients treated within the EORTC 62043/62072 trials
DOI:10.1158/1078-0432.CCR-18-2748

Olivier Mir1, Nathan Touati2, Michela Lia2, Saskia Litière2, Axel Le Cesne1, Stefan Sleijfer3, Jean-Yves Blay4, Michael Leahy5, Robin Young6, Ron H.J. Mathijssen3, Nielka P.Van Erp7, Hans Gelderblom8, Winette T. Van der Graaf7,9, and Alessandro Gronchi10

1 Gustave Roussy, Sarcoma Group, Villejuif, France.

2 European Organization for Research and Treatment of Cancer, Brussels, Belgium.

3 Erasmus MC Cancer Institute, Rotterdam, the Netherlands.

4 Léon Bérard Cancer Center, Lyon, France.

5 The Christie NHS Foundation Trust, Manchester, United Kingdom.

6 Weston Park Hospital, Sheffield, United Kingdom.

7 Radboud UniversityMedical Centre, Nijmegen, the Netherlands.

8 Leiden University Medical Center, Leiden, the Netherlands.

9 The Institute of Cancer Research and the Royal Marsden NHS Foundation Trust, London, United Kingdom.

10 Fondazione IRCCS Istituto Nazionale dei Tumori, Milano, Italy.

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