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GUSTAVE ROUSSY
1er centre de lutte contre le cancer en Europe, 4 000 professionnels mobilisés

Villejuif, le 3 novembre 2017

Les antibiotiques perturbent l'efficacité de l'immunothérapie

Une étude publiée dans la revue Science par des chercheurs de Gustave Roussy, l'Inserm, l'Inra, l'AP-HP, IHU Méditerranée Infection et l'Université Paris-Sud démontre que la prise d'antibiotiques affecte l'efficacité d'un traitement par immunothérapie chez des patients atteints d'un cancer. Or, environ 20% des malades du cancer sont sous antibiothérapie. En analysant le microbiote intestinal de patients par métagénomique, les chercheurs ont montré que la présence de la bactérie Akkermansia muciniphila est associée à une meilleure réponse des patients à l'immunothérapie par anticorps anti-PD-1. De plus, en administrant cette bactérie à des souris comportant un microbiote défavorable, l'activité anti-tumorale de l'immunothérapie est restaurée.

Véritable révolution thérapeutique, l'immunothérapie a prouvé sa supériorité sur le traitement standard dans la prise en charge du mélanome métastatique, du cancer du poumon, du rein ou encore de la vessie mais son efficacité est limitée à une proportion de malades. "Nos travaux expliquent en partie pourquoi certains patients ne répondent pas. La prise d'antibiotiques a un impact négatif sur la survie des malades sous immunothérapies. La composition du microbiote est un facteur prédictif de réussite" résument le Dr Bertrand Routy, médecin hématologue à l'origine de ces travaux et sa directrice, le Pr Laurence Zitvogel, directrice du laboratoire "Immunologie des tumeurs et immunothérapie" (Inserm/Université Paris-Sud/Gustave Roussy).

Dans une première série, sur 249 patients traités par immunothérapie basée sur l'anti-PD-1/PD-L1 pour un cancer avancé du poumon, du rein ou de la vessie, 28% avaient pris des antibiotiques à cause d'une infection dentaire, urinaire ou pulmonaire mais leur état de santé général n'était pas différent de celui des patients non traités par antibiotiques. Les résultats de l'étude démontrent qu'en créant un déséquilibre au niveau du microbiote intestinal (ou dysbiose), la prise d'antibiotiques deux mois avant et jusqu'à un mois après le début du traitement a un impact négatif sur la survie sans progression de la maladie et la survie globale des patients dans ces trois types de cancer.

// Un microbiote favorable déterminé par métagénomique

La composition précise du microbiote intestinal a été établie par métagénomique avant puis pendant le traitement sous immunothérapie chez 153 patients atteints d'un cancer du poumon ou du rein. Cette analyse de tous les gènes bactériens présents dans le microbiote intestinal a été menée par l'Inra (MétaGénoPolis, Dr Emmanuelle Le Chatelier). Une composition favorable, enrichie en Akkermansia muciniphila, a été identifiée chez les patients répondant le mieux à l'immunothérapie et chez ceux dont la maladie était stabilisée pendant au moins 3 mois.  

// Booster un microbiote défavorable

Pour prouver un lien direct de cause à effet entre la composition du microbiote intestinal et l'efficacité de l'immunothérapie, un microbiote favorable (provenant de patients ayant démontré une bonne réponse clinique à l’immunothérapie anti-PD-1) et un microbiote défavorable (provenant de patients en échec) ont été transférés à des souris qui en étaient dépourvues. Les souris transplantées avec le microbiote favorable présentaient une évolution favorable lorsqu'elles étaient traitées par immunothérapie contrairement à celle comportant le microbiote défavorable. Chez ces dernières, l'administration d'Akkermansia muciniphila a permis de restaurer l'efficacité de l'immunothérapie par anti-PD-1. En modifiant le microbiote de la souris, l'efficacité de l'immunothérapie a été rétablie grâce à l'activation de certaines cellules du système immunitaire.

Les résultats d'une équipe américaine (Dr Jennifer Wargo, MD Anderson, Houston, Texas) publiés en même temps dans la même revue viennent appuyer ces données en démontrant que la composition du microbiote de patients atteints d'un mélanome métastatique permet de prédire leur réponse à une immunothérapie anti-PD-1.

Ces travaux se poursuivent dans le cadre du projet Torino-Lumière (programme d'investissement d'Avenir de 9 M€). L'objectif du projet Torino-Lumière est de développer de nouveaux marqueurs prédictifs de la réponse thérapeutique aux immunothérapies des patients porteurs de cancers bronchiques, à partir de l'étude de leur microbiote. Une étude prospective multicentrique a démarré en 2016 avec pour objectif d'établir des signatures bactériennes favorables afin de développer des traitements basés sur une combinaison bactéries/immunothérapies.

À propos de l'immunothérapie

Les immunothérapies ont engendré une révolution thérapeutique en cancérologie. Ces nouvelles immunothérapies, par transfert de lymphocytes T activés ou par anticorps monoclonaux (anti-CTLA4 ou anti-PD1) ou bispécifiques, déclenchent le réveil du système immunitaire du patient.  Elles permettent non seulement de réduire la taille des tumeurs mais aussi, et pour la première fois, de prolonger notablement la survie des malades voire de les guérir de cancers métastatiques ou localement avancés.

À propos du microbiote intestinal

Le microbiote intestinal (anciennement appelé flore intestinale) est un écosystème complexe composé de 100 000 milliards de bactéries, virus, archae, parasites, levures... Ceux-ci colonisent l'intestin dès la naissance et participent à la maturation des défenses immunitaires. Chaque individu est doté d'un microbiote qui lui est propre. Sa composition est dictée par des facteurs génétiques, nutritionnels et environnementaux.  

Source

Gut microbiome influences efficacy of PD-1 based-immunotherapy against epithelial tumors
Science, publication avancée en ligne le 2 novembre 2017, http://science.sciencemag.org/lookup/doi/10.1126/science.aan3706

Bertrand Routy 1,2,3, Emmanuelle Le Chatelier 4, Lisa Derosa 1,2,3, Connie P. M. Duong 1,2,5, Maryam Tidjani Alou 1,2,3, Romain Daillère 1,2,3, Aurélie Fluckiger 1,2,5, Meriem Messaoudene 1,2, Conrad Rauber 1,2,3, Maria P. Roberti 1,2,5, Marine Fidelle 1,3,5, Caroline Flament 1,2,5, Vichnou Poirier-Colame 1,2,5, Paule Opolon 6, Christophe Klein 7, Kristina Iribarren 8,9,10,11,12, Laura Mondragón 8,9,10,11,12, Nicolas Jacquelot 1,2,3, Bo Qu 1,2,3, Gladys Ferrere 1,2,3, Céline Clémenson 1,13, Laura Mezquita 1,14, Jordi Remon Masip 1,14, Charles Naltet 15, Solenn Brosseau 15, Coureche Kaderbhai 16, Corentin Richard 16, Hira Rizvi 17, Florence Levenez 4, Nathalie Galleron 4, Benoit Quinquis 4, Nicolas Pons 4, Bernhard Ryffel 18, Véronique Minard-Colin 1,19, Patrick Gonin 1,20, Jean-Charles Soria 1,14, Eric Deutsch 1,13, Yohann Loriot 1,3,14, François Ghiringhelli 16, Gérard Zalcman 15, François Goldwasser 9,21,22, Bernard Escudier 1,14,23, Matthew D. Hellmann 24,25, Alexander Eggermont 1,2,14, Didier Raoult 26, Laurence Albiges 1,3,14, Guido Kroemer 8-12,27,28*, and Laurence Zitvogel 1,2,3,5*.

1 Gustave Roussy Cancer Campus (GRCC), Villejuif, France.
2 Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale (INSERM) U1015, Villejuif, France. Equipe Labellisée—Ligue Nationale contre le Cancer, Villejuif, France.
3 Univ. Paris-Sud, Université Paris-Saclay, Gustave Roussy, Villejuif, France.
4 MGP MetaGénoPolis, INRA, Université Paris-Saclay, Jouy-en-Josas, France.
5 Center of Clinical Investigations in Biotherapies of Cancer (CICBT) 1428, Villejuif, France.
6 Gustave Roussy, Laboratoire de Pathologie Expérimentale, 94800 Villejuif, France.
7 Centre de Recherche des Cordeliers, INSERM, Université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité, UMRS 1138, Université Pierre et Marie Curie Université Paris 06, Sorbonne Universités, Paris, France.
8 Metabolomics and Cell Biology Platforms, GRCC, Villejuif, France.
9 Paris Descartes University, Sorbonne Paris Cité, Paris, France.
10 Equipe 11 Labellisée—Ligue Nationale contre le Cancer, Centre de Recherche des Cordeliers, Paris, France.
11 Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, U1138, Paris, France.
12 Pierre et Marie Curie University, Paris, France.
13 Department of Radiation Oncology, Gustave Roussy, Université Paris-Saclay, F-94805 Villejuif, France; INSERM U1030, Molecular Radiotherapy, Gustave Roussy, Université Paris-Saclay.
14 Department of Medical Oncology, Gustave Roussy, Villejuif, France.
15 Thoracic Oncology Department-CIC1425/CLIP2 Paris-Nord, Hospital Bichat-Claude Bernard, AP-HP, University Paris-Diderot.
16 Department of medical oncology, Center GF Leclerc, Dijon, France.
17 Druckenmiller Center for Lung Cancer Research, Memorial Sloan Kettering Cancer Center, New York, NY, USA.
18 Molecular Immunology and Embryology, UMR 7355, CNRS, University of Orleans, Orléans, France.
19 Department of Pediatric Oncology, GRCC, Villejuif, France.
20 Preclinical Research Platform, GRCC, Villejuif, France.
21 Department of Medical Oncology, Cochin Hospital, Assistance Publique—Hôpitaux de Paris, Paris, France.
22 Immunomodulatory Therapies Multidisciplinary Study group (CERTIM), Paris, France
23 Institut National de la Santé Et de la Recherche Medicale (INSERM) U981, GRCC, Villejuif, France.
24 Department of Medicine, Thoracic Oncology Service, Memorial Sloan Kettering Cancer Center, New York, NY, USA.
25 Department of Medicine, Weill Cornell Medical College, New York, NY, USA.
26 URMITE, Aix Marseille Université, UM63, CNRS 7278, IRD 198, INSERM 1095, IHU - Méditerranée Infection, 19-21 Boulevard Jean Moulin, 13005 Marseille
27 Pôle de Biologie, Hôpital Européen Georges Pompidou, Assistance Publique—Hôpitaux de Paris, Paris, France.
28 Department of Women's and Children's Health, Karolinska University Hospital, 17176 Stockholm, Sweden.

 

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