Villejuif, le 4 mars 2024
Mars Bleu : Gustave Roussy s’engage pour lutter contre la hausse des cancers digestifs chez les moins de 50 ans
Les cancers colorectaux et du pancréas frappent un nombre croissant de patients jeunes, chez qui ils sont souvent détectés trop tardivement faute de parcours de dépistage adaptés. Gustave Roussy, mobilisé pour guérir le cancer au 21e siècle, veut apporter des réponses à cette tendance inquiétante. En développant d’abord un projet d’étude, YODA, pour évaluer les impacts environnementaux sur l’apparition précoce des cancers gastro-intestinaux. En continuant ensuite de déployer ses capacités de prévention et de dépistage, avec les programmes Interception, Colodépist et InstaDiag.
Considéré comme une maladie touchant principalement des patients âgés, le cancer colorectal est en augmentation parmi les personnes de moins de 50 ans. En 2019, une étude1 se basant sur les données de 143,7 millions de personnes vivant dans 20 pays européens, dont la France, a montré qu’entre 2004 et 2016, les cas de cancers colorectaux ont augmenté de 7,9 % chaque année chez les 20-29 ans. Pour les 30-39 ans, une hausse de 4,9 % a été observée entre 2005 et 2006. Et ceci sans qu’aucune explication scientifique claire ne soit identifiée par les chercheurs.
Cette tendance s’observe également pour le cancer du pancréas. Aux États-Unis, entre 2001 et 2018 2, une hausse des cancers du pancréas de 2,36 % chez les femmes de moins de 55 ans a été mesurée, et de 0,62 % chez les hommes de la même tranche d’âge. On estime que cette maladie sera la 2e cause de mortalité par cancer en France à l’horizon 2030.
Mieux comprendre ces augmentations
Gustave Roussy, premier pôle européen de lutte contre le cancer et quatrième mondial, est mobilisé pour mieux appréhender en France cette dynamique, afin de mieux l’enrayer. Le projet YODA (Young Onset Digestive Adenocarcinoma), qui sera ouvert en 2024, est porté par les docteures Alice Boilève et Cristina Smolenschi. Il vise à explorer les facteurs méconnus liés à l’apparition de cancers digestifs précoces, et identifier les personnes à risque pour leur proposer des stratégies de prévention.
“On assiste ces dernières années à une augmentation importante du nombre de cas de cancers du côlon chez le sujet jeune, c’est-à-dire les personnes de moins de 50 ans. Cette croissance importante n’est pas expliquée en totalité par les facteurs de risque habituels comme l’obésité, la sédentarité, l’alimentation, les comportements addictifs ou les facteurs héréditaires. Face à ces chiffres alarmants, il est urgent d’identifier ce qui en est à l’origine”, expliquent les deux docteures.
YODA visera à mesurer, à l’aide d’une cohorte de patients jeunes (20-49 ans) et d’une cohorte de patients âgés (65-70 ans), les possibles effets de la pollution environnementale, de la nutrition et du mode de vie dans l’apparition de cancers digestifs précoces. Cette étude entend également élucider les signatures moléculaires chez les patients jeunes, pour développer des approches de médecine de précision, et proposer un plan de prévention adapté aux cancers digestifs à apparition précoce.
Intercepter plus de cas
Enrayer l’augmentation des cas de cancers digestifs précoces passe également par la généralisation du suivi des personnes à risques augmentés. C’est à cet objectif que répond le programme Interception de Gustave Roussy, lancé en 2021. Il propose à ces publics un suivi sur mesure et une prévention personnalisée, dans le cadre d’une collaboration ville-hôpital. Pour les cancers digestifs, la prise en charge précoce des patients à risque est primordiale. Détectés assez tôt, le cancer colorectal se guérit dans 9 cas sur 10 ; 8 cas sur 10 pour le cancer du pancréas lorsqu’il est opérable.
Interception propose un parcours dédié aux patients porteurs d’un syndrome de Lynch, une maladie autosomique dominante, responsable d’environ 2 à 3 % des cas de cancers colorectaux. En une journée, les participants reçoivent des informations sur la maladie, les pratiques à adopter pour éviter son apparition, et repartent avec un programme de suivi. Gustave Roussy a également mis en place au sein d’Interception un parcours destiné aux personnes porteuses du syndrome rare de Li Fraumeni qui prédispose au cancer.
L’IHU Prism, porté par Gustave Roussy, se concentre sur la médecine de précision. Ses équipes travaillent à l’élaboration d’un test de dépistage précoce du cancer du pancréas, en se basant sur le profil moléculaire de 200 tumeurs du pancréas à un stade très précoce, et en les comparant aux analyses d’un groupe de personnes sans tumeur.
Augmenter la participation au dépistage et accélérer le diagnostic
Gustave Roussy est aussi mobilisé pour améliorer le dépistage des cancers digestifs. En plus de participer activement à Mars Bleu, mois de sensibilisation à la campagne nationale de dépistage du cancer colorectal, l’Institut s’engage pour réduire les délais de diagnostic. Il a développé le parcours “Colodépist” pour proposer aux personnes qui présentent un test positif ou des antécédents familiaux une prise en charge rapide.
Une première consultation est organisée à Gustave Roussy dans un délai d’une semaine, suivie d’un rendez-vous avec un anesthésiste, puis un endoscopiste, pour programmer une coloscopie sous anesthésie générale dans les 15 jours. Cet examen est réalisé en ambulatoire, et les résultats communiqués au patient le jour même, ceux des éventuelles biopsies dans la semaine.
Concernant le cancer du pancréas, Gustave Roussy a inauguré début 2024 le parcours InstaDiag foie et pancréas, ouvert à tout patient ayant une suspicion ou un diagnostic récent de cancer du pancréas ou du foie. Il débute par une première consultation sous 48 heures, avec un accueil multidisciplinaire par différents spécialistes. Des premiers examens d’imagerie sont réalisés, et d’autres, tels qu’une endoscopie ou une biopsie, programmés sous 7 jours. Enfin, une consultation de synthèse est planifiée et le patient orienté vers un traitement spécifique.
Ces initiatives illustrent la détermination de Gustave Roussy à mieux comprendre, dépister et soigner les cancers digestifs, en augmentation chez les patients de moins de 50 ans, avec l’objectif d’enrayer cette dynamique, et guérir le cancer au 21e siècle.
1- Vuik, Fanny ER, et al. “Increasing Incidence of Colorectal Cancer in Young Adults in Europe over the Last 25 Years.” Gut, vol. 68, no. 10, 16 May 2019, pp. 1820–1826, https://doi.org/10.1136/gutjnl-2018-317592
2 - Abboud, Y., Perrotta, G., & Gaddam, S. (2023). Increasing Pancreatic Cancer Incidence in Young Women in the United States : A Population-Based Time-Trend Analysis, 2001-2018 - Reply. Gastroenterology. https://doi.org/10.1053/j.gastro.2023.07.008