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1er centre de lutte contre le cancer en Europe, 4 000 professionnels mobilisés

Villejuif, le 2 octobre 2019

ESMO 2019

Cancer de la prostate métastatique résistant à l'hormonothérapie : les standards de traitement vont évoluer

Les résultats de deux grandes études cliniques, présentées en séance plénière au congrès de l’ESMO qui s’est tenu du 27 septembre au 1er octobre à Barcelone, devraient modifier les standards de traitement des patients atteints d'un cancer de la prostate métastatique résistant à l'hormonothérapie. Le Pr Karim Fizazi, oncologue spécialiste du cancer de la prostate à Gustave Roussy, qui a participé à ces études internationales les a coordonnées en France.

Avec environ 50 000 nouveaux cas par an, le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent en France1. En 2013, il a provoqué 8 625 décès en France2, soit 7,5 % des décès par cancer ; il se situe au 3ème rang en termes de décès par cancer chez l’homme, et au 5ème rang tous sexes confondus. Le traitement des cancers de la prostate métastatiques repose principalement sur l'hormonothérapie (hormonothérapie conventionnelle ou de nouvelle génération telle que l'acétate d’abiratérone ou l'enzalutamide) afin d’inhiber la sécrétion de la testostérone. Il s'appuie aussi sur une chimiothérapie à base de taxane (docetaxel ou cabazitaxel). Mais chez les hommes en échec de ces traitements, les options sont plus limitées et la mortalité reste élevée.

Les inhibiteurs de PARP (poly-ADP-ribose-polymérase-1), une protéine utilisée par les cellules cancéreuses pour réparer les dommages de l’ADN, ont néanmoins redonné espoir aux médecins. En se liant à la protéine PARP, ces médicaments l’empêchent de procéder aux réparations des lésions de l’ADN, et provoquent la mort des cellules cancéreuses3,4. Or, environ 20 % des patients atteints d’un cancer de la prostate métastatique résistant à l'hormonothérapie présentent des anomalies au niveau des gènes de réparation de l’ADN (mutation de BRCA2, BRCA1, ATM...), susceptibles de conférer une sensibilité aux inhibiteurs de PARP (poly-ADP-ribose-polymérase-1).

L’inhibiteur de PARP Olaparib vs une deuxième hormonothérapie de nouvelle génération

Maha Hussain (Robert H. Lurie Comprehensive Cancer Center, Chicago), a dirigé l’étude PROfound, un essai de phase III multicentrique évaluant l’inhibiteur de PARP olaparib (un médicament déjà indiqué dans le traitement du cancer de l’ovaire), auquel a participé le Pr Karim Fizazi, Professeur d’oncologie médicale à Gustave Roussy.

Les chercheurs ont recruté 387 hommes dont la tumeur avait continué d’évoluer malgré une première chimiothérapie (docétaxel le plus souvent) et une hormonothérapie de nouvelle génération (acétate d’abiratérone+prednisone ou enzalutamide). Tous présentaient au moins une altération génétique dans leur tumeur. Les participants étaient séparés en deux groupes : la cohorte A incluant 245 hommes dont la tumeur présentait des mutations sur les gènes BRCA1, BRCA2 ou ATM ; la cohorte B incluant 142 hommes avec d’autres altérations génétiques. Les patients ont ensuite reçu soit 300 mg d’olaparib (162 patients de la cohorte A, 94 dans la cohorte B), soit une l’hormonothérapie de nouvelle génération qu’ils n’avaient pas initialement reçue (1000 mg d’acétate d’abiratérone+prednisone ou 160 mg d’enzalutamide) (83 cohorte A, 94 cohorte B).

Plus de 5 mois supplémentaires de survie sans progression

Au total, 256 patients ont reçu l’olaparib, pendant une durée médiane de 7,4 mois. Les patients du groupe hormonothérapie chez lesquels ce traitement n’était pas efficace pouvaient alors recevoir l’olaparib. Les analyses des données de la cohorte A montrent, à 6 mois, que la maladie n'avait pas progressé chez 60 % des patients sous olaparib, contre seulement 23 % sous hormonothérapie (ces taux étaient de 28 % et 9 % à 1 an) ; le taux de réponse objective (ORR) était de 33,3 % sous olaparib, contre seulement 2,3 % sous hormonothérapie. Les analyses des données de l’ensemble des patients (cohortes A et B associées) confirment ces bons résultats puisque les patients sous olaparib ont gagné près de 6 mois sans que la maladie progresse. Globalement, ce sont les hommes avec une mutation sur les gènes BRCA2, RAD51B et RAD54L qui semblent le plus bénéficier de l’olaparib. Le médicament a été bien toléré, avec des effets secondaires comparables à ceux observés dans les autres tumeurs où il est employé.

Le cabazitaxel supérieur à une deuxième hormonothérapie de nouvelle génération

La seconde étude présentée en séance plénière au congrès de l’ESMO a été dirigée par Ronald de Wit. Baptisée CARD, il s’agit d’un essai multicentrique randomisé de phase IV comparant l’efficacité et la sécurité d’une chimiothérapie (bras A : cabazitaxel plus prednisone) à celle d'une deuxième hormonothérapie nouvelle génération (bras B : enzalutamide ou acétate d’abiratérone+prednisone) chez des patients atteints d’un cancer métastatique de la prostate résistant à l'hormonothérapie traditionnelle et à une hormonothérapie de nouvelle génération (abiraterone ou enzalutamide), déjà traités par le docétaxel, et dont le cancer a évolué dans les 12 mois suivant le début de l'hormonothérapie de nouvelle génération.

Au total, 255 hommes ont répondu aux critères d’éligibilité : 129 ont rejoint le bras A de l’étude, 126 le bras B. À 6 mois, le taux de survie sans progression du cancer évalué par imagerie a atteint 64 % chez les patients du bras A, contre seulement 36 % chez ceux du bras B (23 et 7 % à 12 mois, 9 et 3 % à 18 mois). Comparé à une 2e hormonothérapie de nouvelle génération, le cabazitaxel a prolongé la survie globale médiane de 2 mois et demi (13,6 mois contre 11 mois), et réduit la mortalité de 36 %. Plusieurs autres paramètres ont confirmé la supériorité de la chimiothérapie par rapport à une 2e hormonothérapie de nouvelle génération : réduction du taux de PSA chez 35,7 % des malades (contre 13,5 %), réponse objective de la tumeur au cabazitaxel dans 36,5 % des cas (contre 11,5 %) et baisse de la douleur chez 45 % des hommes (contre 19,3 %).

Ces données permettent à la fois de positionner le cabazitaxel comme arme de recours chez des hommes ayant déjà reçu de l’abiraterone ou de l’enzalutamide et le docetaxel et elles permettent également d’identifier un sous-groupe de patients défini sur des bases moléculaires (les anomalies des gènes de réparation de l’ADN) qui peuvent bénéficier dans cette même situation d’un traitement oral, l’olaparib.

1 - INCa, Incidence projetée en 2017 par localisations cancéreuses chez la femme et l'homme - Nombre de cas, taux standardisé monde, contribution et rang.
2 - INCa.
3 - Mateo J et al. J Clin Oncol 2019;37:abstract 5005
4 - Abida W et al. Ann Onc 2018;29:abstract 793PD

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