Le Professeur Gustave Roussy
Gustave Roussy est né en 1874, en Suisse, près de Vevey. Après des études de médecine à Genève puis à Paris, il est nommé en 1901 à l'internat des hôpitaux de Paris. Il travaille alors avec les Dr Jean Darier et Joseph Jules Dejerine. Ce dernier occupe alors l'ancien service de Jean-Martin Charcot à la Salpêtrière. Son influence est déterminante dans la vocation neurologique de Gustave Roussy.
Sa thèse est consacrée à l'étude d'un syndrome connu aujourd'hui sous le nom de Dejerine-Roussy caractérisé par un syndrome thalamique (qui se rapporte au thalamus, partie de l'encéphale située à la base du cerveau), des douleurs intenses et des déficits moteurs passagers.
"C'est par la neurologie, écrira-t-il, que je suis venu à l'anatomie pathologique". Cette curiosité le pousse vers la chaire de physiologie et physiopathologie qu'occupe F. Franck au Collège de France.
Agrégé d’anatomie pathologique
Devenu français en 1907, il occupe les fonctions de préparateur et découvre les techniques d'anatomie pathologique.
À 34 ans, il devient professeur agrégé d'anatomie pathologique. Ses travaux, consacrés à l'hypophyse, à l'acromégalie, au myxoedème et aux para-thyroïdes, témoignent de la permanence de son orientation anatomo-clinique. Celle-ci ne sera pas interrompue par la guerre 1914-1918 qu'il passe au service de l'armée de Lorraine.
En 1914, il publie avec J. Lhermitte un traité consacré aux "techniques anatomo-pathologiques du système nerveux, anatomie macroscopique et histologique".
Gustave Roussy devient ensuite clinicien neurologue sur les hauteurs de Villejuif, à l'hôpital Paul-Brousse. Aux portes de Paris, Villejuif est alors constitué de bidonvilles où s'entassent les marginaux, pauvres, et émigrés. C'est là que Gustave Roussy observe le cancer dans son expression la plus poignante.
Le premier centre anticancéreux
En 1925, Gustave Roussy crée au sein de l'hôpital Paul-Brousse "le premier centre anticancéreux de la banlieue parisienne". Il souhaite que ce centre soit autre chose qu'un lieu de triage, de diagnostic et de soins des tumeurs.
Il obtient du Conseil général de la Seine, la construction de bâtiments indépendants et la mise en place d'une structure administrative hiérarchisée et autonome qui met le centre anticancéreux à l'abri des tentations d'annexion des administrations voisines.
Pathologiste habitué à aborder les maladies à travers leurs causes, Gustave Roussy conçoit le centre aussi comme un foyer d'investigation et de recherche. Dans cette optique, il crée un laboratoire de cancérologie expérimentale dont il confie la direction à Charles Oberling.
Il publie en 1933 avec R. Leroux et C. Oberling, son agrégé depuis 1926, un des rares traités d'anatomie pathologique en langue française.
La même année, il est élu doyen de la faculté de médecine et nommé, en 1937 par le ministre, recteur de l'académie de Paris.
De l’Institut du Cancer à l’Institut Gustave-Roussy
En 1939, Gustave Roussy entre à l'Académie des sciences et publie, à l'usage des étudiants et des praticiens, un livre sur le cancer où il appelle à considérer cette affection comme une maladie ordinaire susceptible de bénéficier des progrès d'un dépistage précoce et d'une approche scientifique concertée.
Démis de ses fonctions de recteur en 1940 par le gouvernement de Vichy, il les reprendra en 1944, à la Libération.
À cette époque, la chirurgie d'exérèse (ablation des tumeurs) et les radiations ionisantes représentent les seuls traitements. Les effets biologiques des radiations, les critères de radiosensibilité d'une tumeur sont encore imparfaitement connus. Gustave Roussy appelle auprès de lui Simone Laborde, épouse d'Albert Laborde, collaborateur de Pierre et Marie Curie.
En 1946, René Huguenin prend ses fonctions de directeur de l'Institut du Cancer. Gustave Roussy se consacre dès lors à ses fonctions rectorales.
Début 1947, il est appelé à siéger au Conseil des ministres. Quelques mois plus tard, accusé par les services du ministère des Finances de "transport illicite d'argent entre la France et la Suisse", il est contraint à la démission de ses fonctions de recteur et de ministre.
Animée par des rivalités politiques, se développe une campagne de presse humiliante que Gustave Roussy ne peut supporter ; il tente de s'empoisonner.
Soutenu par son entourage et ses élèves, il se bat pour se laver des accusations portées contre lui. "A la France, pays de mes ancêtres où je suis revenu, écrira-t-il, j'ai donné tout ce que j'avais de force". Sa bonne foi est reconnue, un non-lieu est prononcé en mai 1948 ; Gustave Roussy sera officiellement réhabilité deux ans plus tard.
Malgré cette décision de justice - tardive - Gustave Roussy, blessé, se donne la mort le 30 septembre 1948.
L'Institut du Cancer reçoit le nom de son fondateur et devient l'Institut Gustave-Roussy en 1950.