Si les médecins s'appuient en majeure partie sur la biopsie de la tumeur pour poser le diagnostic d'un cancer, elle est aussi utilisée pour la recherche d'anomalie moléculaire tout au long de la prise en charge des patients. Grâce aux résultats encourageants d'essais, présentés ces dernières années lors de congrès internationaux, les prélèvements de tissu tumoral pourraient laisser place à une simple prise de sang.
La biopsie détermine le diagnostic à poser sur un cancer mais aussi ses caractéristiques moléculaires et, ainsi, les choix des traitements les mieux adaptés. La tumeur évoluant, des analyses moléculaires parfois régulières sont nécessaires. Or, l'acte (chirurgical, radiologique, endoscopique…) qui consiste à prélever un échantillon de tumeur pour l'analyser, peut être invasif et douloureux. La biopsie liquide peut se substituer à ces actes de suivi, la biopsie initiale permettant seule de poser le diagnostic de cancer.
La dégradation des cellules, saines ou tumorales, dans l'organisme est un phénomène naturel ; des brins d'ADN circulent donc dans le flux sanguin. Le principe de la biopsie liquide est d'identifier l'ADN provenant de cellules cancéreuses dans le sang. C'est un vrai défi technologique car la quantité d'ADN tumoral circulant est très faible. Après une première biopsie classique, une simple prise de sang permet d'examiner l'évolution moléculaire de la tumeur et de surveiller l'apparition possible de résistances pour ajuster le choix d'une thérapie ciblée.
"La biopsie liquide est une alternative prometteuse lorsque des biopsies traditionnelles à répétition sont complexes à réaliser, particulièrement chez les patients fragiles ou âgés ; ou lorsque la tumeur, pulmonaire ou osseuse par exemple, est difficilement atteignable et analysable. Une contrainte qui disparaît grâce à la biopsie liquide", souligne le Pr Benjamin Besse, responsable du comité de Pathologie thoracique à Gustave Roussy. Une autre technique consiste à rechercher non plus des fragments d'ADN de la cellule, mais les cellules tumorales elles-mêmes. Ces cellules tumorales circulantes, si elles sont rares et difficiles à détecter, pourraient permettre de mieux comprendre la tumeur et son évolution. C'est tout le travail de l'équipe de Françoise Farace à Gustave Roussy.
"Gustave Roussy est le premier centre à formaliser une consultation fondée sur une biopsie liquide pour une recherche moléculaire sur l'ADN circulant chez des patients atteints d'un cancer du poumon : la consultation ORACLE" (pour mOleculaR Alterations in Cancer Liquid biopsiEs), précise le Dr Laura Mezquita, oncologue en Pathologie thoracique. Avec cette consultation, des patients suivis à l'Institut ou non se voient proposer une recherche de mutation sur le gène EGFR. Ainsi, il est possible de repérer une résistance à un traitement et d'adapter le choix thérapeutique.
La recherche, qui porte uniquement sur le gène EGFR, sera élargie d'ici fin 2017 à d'autres gènes d'intérêt dans le cancer du poumon.En outre, la biopsie liquide pourrait, d'ici quelque temps, être indiquée en routine pour la plupart des cancers. Dans quelques mois, une consultation ORACLE Sein ouvrira à l'Institut.
Gustave Roussy a présenté à l'ASCO 2017 deux études portant sur la biopsie liquide de patients atteints de cancer de poumon. La biopsie liquide permet d'analyser plus facilement les cellules tumorales et d'y détecter d'éventuelles mutations génétiques pour mieux adapter le traitement du patient. Les explications du Pr Benjamin Besse de Gustave Roussy.
> Soutenir la recherche sur le cancer du poumon et la biopsie liquide
Si les biopsies liquides présentent des avantages considérables, les biopsies conventionnelles demeurent indispensables pour poser le diagnostic initial d'un cancer, en définir le stade, étudier l'environnement tumoral… De plus, l'ADN de certaines tumeurs, notamment cérébrales, ne se trouve pas en quantité suffisante pour être détectable dans le sang. Leurs mutations génétiques restent encore indécelables par la biopsie liquide.