Villejuif, le 30 janvier 2017

Bilan & perspectives
Spécial immunothérapie

Avec plus de 80 essais cliniques en cours et 1 600 patients traités depuis 2010, Gustave Roussy est le plus important centre d’immunothérapie des cancers en Europe, tant en nombre d’essais cliniques que de patients traités.

Cet effort a pu être réalisé grâce à un programme spécifique qui a permis de doubler la prise en charge des malades en immunothérapie sur l’année 2016.

Son nom, le GRIP pour Gustave Roussy Immunotherapy Program. Ses deux principaux objectifs, accélérer le développement clinique de l’immunothérapie et renforcer la recherche translationnelle sur ces nouveaux traitements.

A l’occasion de la journée mondiale contre le cancer le 4 février prochain, Gustave Roussy dresse un bilan de l’immunothérapie à l’Institut et dessine les perspectives de son programme.

L’immunothérapie révolutionne actuellement le traitement de nombreux cancers. Plusieurs médicaments d’immunothérapie sont maintenant disponibles en France pour le traitement des mélanomes, de certains cancers du poumon, rein, vessie et les rechutes de leucémies lymphoblastiques B. Une activité anti-tumorale a été rapportée dans plus de 25 cancers différents et des bénéfices en survie globale ont été démontrés dans des essais randomisés de phase III dans plus de 6 indications. En cancérologie, c’est la première fois qu’avec une même molécule on arrive à traiter autant de cancers différents, notamment chez des patients en situation de rechute après les traitements conventionnels.

 « Chez certains patients on voit le cancer régresser, parfois disparaître complètement et de façon durable. Maintenant l’objectif est d’augmenter le nombre de patients qui pourraient bénéficier de ces traitements. Il faut pour cela comprendre pourquoi cela ne fonctionne pas chez certains, et développer des associations qui potentialisent l’effet » expliquent les directeurs scientifique et clinique du programme GRIP, respectivement le Pr Laurence Zitvogel et le Dr Aurélien Marabelle.

 À Gustave Roussy, les nouveaux essais cliniques lancés dans le cadre du GRIP vont permettre d’identifier de nouveaux médicaments, de nouvelles combinaisons et de nouvelles indications d’immunothérapies.  

La première organisation dédiée à la prise en charge des effets secondaires des immunothérapies

Même si les immunothérapies sont bien mieux tolérées que les chimiothérapies, elles peuvent générer chez certains patients de nouveaux effets secondaires, parfois sévères (10% des patients traité par anti-PD-1/PD-L1) de type auto-immuns. Avec les immunothérapies autorisées en AMM ou ATU, de plus en plus de patients vont avoir accès en routine à ces thérapies et non plus dans le cadre sécurisé d’un essai clinique.

Depuis plus d’un an, une organisation spécifique a été mise en place à Gustave Roussy pour prendre en charge de façon optimale ces nouveaux effets secondaires, les recenser pour mieux les connaitre, et diffuser cette expertise. Cette organisation repose sur :

  • Un réseau d’experts d’organes (endocrinologue, cardiologue, neurologue…) pour une prise en charge spécifique des effets secondaires avec la création par l’AP-HP d’un Centre d’Expertise des Complications des Immunothérapies Anti-Cancéreuses au niveau des hôpitaux Paris-Sud ;
  • Une réunion de concertation pluridisciplinaire dédiée et à ouverture nationale (RCP iTox) ;
  • Une base de données de pharmacovigilance dédiée et multicentrique (REISAMIC) ;
  • Une application iphone/android pour venir en support des prescripteurs ;
  • Une documentation d’information spécifique pour les patients et leurs médecins traitants.  

Des essais cliniques d’immunothérapie innovants

Plus de 15 nouvelles immunothérapies sont actuellement développées en clinique à Gustave Roussy en collaboration avec de multiples partenaires industriels. En parallèle, Gustave Roussy assure la promotion d’une dizaine d’essais cliniques multicentriques évaluant de nouvelles indications, de nouvelles combinaisons ou de nouvelles administrations de ces molécules afin d’augmenter le bénéfice des immunothérapies pour un plus grand nombre de patients.

« Ces essais cliniques académiques sont essentiels car ils sont adossés à d’important efforts de recherche translationnelle dans nos laboratoires de recherche avec l’objectif d’identifier des biomarqueurs d’efficacité des immunothérapies » indique le Dr Marabelle. Exemple avec 3 essais qui viennent d’ouvrir à Gustave Roussy :

  • NIVIPIT (NCT02857569) : cet essai randomisé de phase I/ II propose à des patients atteints de mélanome métastatique 2 immunothérapies en combinaison, un anti PD-1 et un anti- CTLA4. Ce dernier sera directement injecté dans la tumeur au lieu de la voie sanguine pour stimuler l’immunité localement et diminuer la toxicité de la molécule.
  • PEMBIB (NCT02856425), essai de phase Ib qui consiste à combiner 2 molécules de classe différente, une immunothérapie anti-PD-1 et un anti-angiogénique qui empêche la formation de nouveaux vaisseaux sanguins tumoraux. La combinaison de ces deux familles de médicaments pourrait permettre d’obtenir une synergie thérapeutique et une efficacité supérieure à chacun des médicaments utilisés seuls.
  • SABR (NCT02992912), essai de phase II évaluant l’efficacité d’une immunothérapie anti-PD-L-1 associée à de la radiochirurgie (radiothérapie stéréotaxique) chez des patients porteurs d’un cancer métastatique du poumon, du colon ou du rein. L’idée est qu’en la détruisant grâce aux rayons de très haute énergie, la tumeur libère des signaux qui renforcent l’immunité stimulée par l’immunothérapie.

L’immunologie des cancers dans un centre intégré de recherche

Cette recherche clinique foisonnante est adossée à un robuste programme de recherche translationnelle en immunothérapie, appuyé par de solides infrastructures : un laboratoire d’immunomonitoring, une plateforme d’immuno-marquage, deux laboratoires Inserm (UMR1186 et U1015) avec une longue expérience de l’analyse immunologique des cancers.

Les équipes de recherche de Gustave Roussy s’intéressent aux mécanismes d’action et de résistance aux immunothérapies, recherchent des biomarqueurs prédictifs de réponse, explorent l’immunologie des cancers dans leur globalité afin d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques... « Par exemple, nous avons récemment identifié chez des patients des bactéries intestinales capables d’améliorer la réponse thérapeutique d’une immunothérapie et de diminuer un effet secondaire (colite inflammatoire) régulièrement rencontré avec ce traitement » décrypte le Pr Zitvogel.

Un autre essai clinique promu par Gustave Roussy, l’essai MATCH-R, cherche à identifier les mécanismes de résistance primaires et secondaires aux immunothérapies à partir des portraits moléculaires tumoraux.

Une réunion mensuelle d’interface entre cliniciens et chercheurs appelée « ImmuKnowledgey » permet d’accélérer la diffusion des connaissances et le partage d’expertise entre les différents acteurs.

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